De l'Ariège à la Galice en boucle

Un voyage en couple de 93 jours à vélo, de l'Ariège jusqu'au bout de la Galice avec une double traversée des Pyrénées pour boucler la boucle. Un peu plus de 4000 km et 1100 eur de budget par personne.

 


 

PYRÉNÉES CATALANES (J6)

La aventura commence aux portes de la Cerdagne catalane, à Latour de Carol que nous rejoignons en train depuis l'Ariège. Premier bivouac et premier lit de gentianes des Alpes et de printemps (fleurs bleues) et camélées (fleurs roses), le tout salué par quelques isards. On sent déjà qu'on va ''se mettre bien''.

Les très grosses chaleurs nous fatiguent et nous peinons à prendre notre rythme de 'pédale' 7h-11h, 17h-19h. Cette première semaine est marquée par de belles baignades et le magnifique massif de Montsec que nous parcourons à pied et à vélo.

 






PYRÉNÉES ARAGONAISES (J16)

Nous parcourons les Pyrénées espagnoles en direction de l'ouest. Outre les paysages magnifiques (sierra de Guara😍), cette partie est marquée par quelques pépites :

-en l'espace de 4j, je rencontre Florent qui m'a hébergé sur l'Aubrac en février (et qui vadrouille aussi à vélo), mon coach de trail, mon kiné et mon garagiste !

-4 crevaisons, on se demande si la chambre à air va devenir aussi recouverte de rustines qu'un adolescent de boutons

-la chaleur a un effet positif : dormir à la belle étoile. Nous avons passé quelques nuits délicieuses.

-pas mal d'animaux rencontrés depuis le début : sangliers, marcassin, isards, marmottes, vautours fauves, vautour percnoptère et probablement un vautour moine, faucon crécerelle, chevreuil, renards, lapins, perdrix, milan royal, serpents, cigognes, écureuils, un escargot et une mante religieuse fous qui voulaient faire du covoiturage et pleins de choses qu'on ne saurait nommer...et beaucoup beaucoup beaucoup de Français en sierra de Guara (!)

-les espagnols respectent les vélos de façon GENIALISSIME : la quasi totalité double en étant entièrement sur la voie de gauche, ralentissent et attendent tranquillement avant de doubler s'il n'y a pas de visibilité. En France nous devons faire pareil !

 






 

BARDENAS REALES et LA POULE (J18)

Nous avions déjà cuit comme des poulets la première semaine au milieu des cols pyrénéens. Nous quittons cette fois les montagnes pour nous diriger vers le ''désert'' des Bardenas où nous avions peur d'une véritable pyrolyse car c'est une région très chaude d'Espagne. Nous avons plutôt bien supporté la traversée de cette région sédimentaire aride, mais cultivée (céréales).

Peu avant les Bardenas, nous nous arrêtons dans un village qui a des airs de villages fantômes andins à l'heure de la sieste : une luminosité aveuglante, des rues quadrillées à angles droits, une Plaza de armas, de rares sapiens longeant les murs, de la poussière, quelques chiens errants et une poule. La poule, c'est Salomé.

Nous l'avons péjorativement appelée ainsi car elle marchait comme une poule, c'est à dire vite, à petit pas et les bras raides. Elle venait alors s'asseoir sur notre banc en répétant plusieurs fois qu'elle avait besoin de s'asseoir. Puis elle repartait. Et revenait. Répétant son manège plusieurs fois.

Communément, on appelle ces gens des fous. Mal à l'aise, nous pensions alors quitter les lieux. Alors que j'étais affalé sur mon banc à lire les jambes en l'air, elle est venue une énième fois s'asseoir, chassant Gaby de sa place. Puis elle a invité Gaby à s'asseoir, toujours en répétant la même phrase plusieurs fois et rapidement. Il s'ensuivit un silence. Gaby engagea la conversation.

Une heure plus tard, elles étaient encore en train de discuter et je lisais distraitement mon livre tout en écoutant la vie de Salomé. Ce n'était ni une poule, ni une folle, mais une personne atteinte de la maladie de Parkinson qui avait plein de choses à nous raconter...

 





 

RIOJA et CASTILLA & LEÓN (J30)

La suite du voyage, toujours en direction de l'ouest, s'avère plus plate et nous rejoignons quelques grandes villes : Logroño, Burgos, León. Les villes nous permettent de remplir nos sacoches de fruits et légumes sans pesticide, chose quasi impossible en campagne, et nous mangeons désormais comme des princes.

Nous quittons les oliviers et les amandiers pour les vignes, puis les céréales. Nous avons traversé la Rioja de Logroño à Burgos par les montagnes (et non les vignes). Nous avons particulièrement apprécié Burgos. De celle-ci à León nous avons pris le chemin de Saint-Jacques : des pistes en terre, des champs et des pèlerins ! Aidés par un vent dans le dos, la conduite et la vitesse furent presque jouissives dans des paysages monotones. Ce parcours de ''transition'' nous oblige à voir des choses que nous n'aurions même pas osé aller voir. La plupart des villages me semblent tout simplement horribles. Il y a aussi beaucoup de maisons abandonnées.

Après 4j de plat et de presque agonie à cause de la chaleur, nous comatons dans un parc à l'ombre de 13h à 19h. Il fait tellement chaud que c'est même fatiguant de se reposer. L'atmosphère est surréaliste car il y a depuis quelques jours un nuage de sable saharien sur nos têtes (nous avons assisté à un superbe coucher de soleil 'africain'). Puis nous attendons l'orage et nous nous mettons à l'abri sous un porche, le long de la rue principale de ce village de 800 habitants. Nous comptons dormir ici cette nuit sans déplier la tente. Alors même que mes pensées se dirigent aujourd'hui vers ''il n'y a vraiment rien à voir ni à faire dans ce coin'', Francisco et ses deux filles nous invitent à dormir chez lui. Nous hésitons fortement puis acceptons.

Francisco, María, Pillar et sa compagne vivent dans un ancien hôtel désaffecté depuis 15 ans. Il y a 12 chambres mais le peu que nous avons partagé suinte la misère. D'une gentillesse incroyable, la maman ira calmer le chien enchaîné à notre arrivée et départ afin qu'il n'aboie pas, les filles iront nous chercher serviettes et savons, tandis que Francisco ira nous servir à boire et nous cueillir des cerises. Nous observons, impuissants, à cette carte postale de pauvreté sentant le tabac et leur repas qui se compose uniquement de riz baignant dans un bouillon. Les filles nous feront un bisou avant d'aller dormir et c'est finalement peut être cet instant si précieux, le premier en 30 jours de voyage, que nous venons chercher en voyage...

 





  

GALICE, entre SUPPLICE et DÉLICE (J33 à J58)

Après Léon direction la Galice, région Nord Ouest de l'Espagne, ou la Bretagne espagnole.

La canicule n'était qu'un début. Passés le panneau 'Galice' nous avons perdu 20 degrés en 48h pour passer à 15 degrés maxi et nous nous sommes pris une saucée mémorable. Certains potes diront que c'est bien fait pour moi et que j'avais bien besoin d'une douche (record de 9j sur ce voyage). Trempés jusqu'aux os nous avons demandé l'hébergement, ou plutôt une place dans un jardin pour poser notre tente. Bien sûr, nous avons été accueillis à bras ouverts. Non, c'est une (mauvaise) blague et nous sommes restés comme des endives mouillées dans la rue. Finalement nous avons fini chez les pompiers pour prendre une douche et un chocolat chaud !

Une semaine d'orage nous a obligé à chercher des abris anti foudre (porches d'église bien souvent). Une nuit, il a fallu chasser des chiens et nous avons touché le fond en dormant sous un préau d'un gymnase au pied des poubelles et avec les moustiques.

Nous avons fait un détour de plusieurs jours pour aller chercher un logement chez l'habitant pour un peu de conversation espagnole et une journée complète sans vélo dans un coin qui avait l'air sauvage mais celui-ci a eu le COVID la veille de notre arrivée. Nous avons donc fait un 2e détour pour aller chercher des gorges que nous n'avons pas vues car on ne voyait pas à 20m (brouillard). Il y avait quand même des châtaigniers magnifiques et une ambiance féerique. Au final nous avons enfin touché l'océan vers Vigo mais aussi un trafic insupportable pour un cyclo voyageur. Nous avons plus respiré de gaz de pots d'échappement que lors de mes 5 dernières années de vie...

Après plusieurs jours de zigzags entre les voitures, de bivouacs pas terribles, de villes pas très belles, de difficultés à poser la tente chez l'habitant (100% de refus hors plateformes internet lors de notre passage en Galice), nous avons enfin touché du doigt l'aventure que nous venions chercher en Galice à partir du Cap Finistère : côte sauvage, parfois pistes, petites routes, du vent (40 à 60 km/h nord-est en moyenne, et comme par hasard nous allons au nord-est...), des baignades dans les rouleaux et des plages splendides...Le vent (le sel et le sable) nous a décollé la crasse pendant une dizaine de jours. Désormais place à une nouvelle canicule.

 







 

TRAVERSÉE CORDILLÈRE CANTABRIQUE (J59 à J71)

La cordillère Cantabrique est une chaîne de montagne d'environ 300 km orientée Ouest-Est et son épine dorsale à +2000m d'altitude est située à une quarantaine de km de l'océan.

13 j, 600 km et un champ de murs nous attendaient pour notre plus grand bonheur des yeux et pour le pire malheur des mollets. L'accueil, les pistes, les bivouacs, les surprises, les paysages, tout était au top! Les difficultés ont été quelques dérapages (in)contrôlés et une dernière journée entière de pluie/brouillard particulièrement longue avec 3 cols. Mais cette dernière difficulté a été balayée le soir même par un accueil spontané exceptionnel chez Clara et José (dodo sur un lit, douche, dîner, bières, petits chaussons aux pieds et petit déjeuner gargantuesque). Bref, on a tellement kiffé cette région que Gaby pédale même sans les pieds (cf photo) !

Direction le pays basque et ses pintxos ! Oupaaaaaaa !

 






 

TRAVERSÉE PYRÉNÉENNE FRANÇAISE (J72 à J93)

Nous avons atteint les sommets en terme d'accueil à la sortie de la cordillère Cantabrique : le lendemain de l'accueil spontané par Clara et José, c'est au tour de Javi, Itxaso, leur fille et la grand mère de nous accueillir spontanément dans leur jardin et autour d'un excellent repas. Jamais deux sans trois : le lendemain, alors que nous entrons au pays basque, Pablo nous invite à manger et dormir chez lui en nous doublant... à vélo ! Nous avons ensuite enchaîné un merveilleux accueil de deux jours via le réseau 'warmshowers' chez Miren dans la ville très appréciée de Vittoria.

Le Pays Basque espagnol, Navarre et leurs magnifiques maisons basques aux balcons fleuris, puis la frontière française... Malheureusement, en deux heures de temps je suis klaxoné deux fois et serré sur le côté. En Espagne, nous avons été klaxonés moins de 5 fois en 3 mois... Première nuit en France et premier lever en fanfare pour enlever la tente avec menace d'amende. A l'inverse en Espagne, on nous invitait à aller sur les terrains publics et on nous a même arrêté l'arrosage automatique une fois !

A part cela, il ne nous restait plus que quelques 'bosses' (et des orages) pour traverser les Pyrénées françaises d'ouest en est, passer chez les amis des Hautes Pyrénées, et boucler la boucle !